La loi Leonetti encadre la fin de vie depuis 2005. Mais entre
pro et anti-euthanasie, la question du "suicide assisté" continue
d'agiter les consciences, alors que François Hollande a promis à plusieurs
reprises "une assistance médicalisée pour terminer sa vie dans la dignité".
I)
La peur suscitée par le
débat
Le débat sur la fin de vie fait régulièrement surface en
France et partout en Europe , opposant défenseurs des soins palliatifs (soins
actifs délivrés dans une approche globale de la personne atteinte d'une maladie
grave, évolutive ou terminale…) et partisans de la législation de l’euthanasie .Les
représentations courantes de la fin de vie traduisent souvent de fortes
craintes de la part du public :
D’abord une peur importante de la déchéance liée à l’âge et
à la maladie, en particulier dans leurs répercussions sur la dépendance
physique , la perspective d’une perte potentielle de contrôle de sa propre vie
dans un contexte de souffrance, apparaît comme insupportable. Alors, dans notre
société post-moderne, apparaît en réaction une revendication de se procurer les
moyens de lutter contre la souffrance tout en conservant une maîtrise maximale
de sa fin de vie
Par ailleurs, une autre grande crainte face à la perspective
de la maladie grave est celle de ne pas se sentir écouté par le corps médical :
que nos préoccupations, nos craintes, nos attentes ne soient pas prises en
compte, du fait d’une obstination déraisonnable des médecins perçue comme
systématique.
a)
Des médecins parfois
perdus
Les médecins, portés par une déontologie médicale déjà très
riche, ne comprennent pas toujours la justification de nouvelles lois impactant
leur métier. À plus forte raison lorsque ces lois insistent sur le respect des
droits du malade, en particulier son information et son consentement. Et cela
peut aggraver un sentiment de culpabilité déjà présent, en lien avec celui
d’impuissance face à la maladie grave et à la mort. Ainsi, l’incitation à
travailler dans la collégialité pour prendre une décision de limitation de
traitement, permet d’apporter un éclairage plus riche dans une situation
complexe, sans remettre en question la compétence.
II)
La loi Leonetti
Les grands principes de la loi Leonetti peuvent être résumés
de la façon suivante :
1. Demeure l’interdit fondamental de donner délibérément la
mort.
2. Elle énonce l’interdiction de l’acharnement
thérapeutique, c’est-à-dire l’obstination déraisonnable d’administrer des actes
« inutiles, disproportionnés ou n’ayant d’autre effet que le seul maintien
artificiel de la vie. »
3. Le respect de la volonté du patient s’il est en état
d’exprimer sa volonté doit être respectée pour apprécier le caractère «
déraisonnable » de certains actes médicaux. Sinon, c’est le médecin qui prend
la décision, après avoir recherché quelle pouvait être la volonté du patient (
consultation de la personne de confiance, de la famille), et avoir respecté une
procédure collégiale.
4. La loi fait obligation au médecin de soulager la douleur,
de respecter la dignité du patient et d’accompagner ses proches. Quand les
traitements curatifs cessent, la loi demande qu’on dispense les soins
palliatifs.
III) Les
divergences créées par cette loi
La question de la fin de vie est complexe et fait apparaître
de graves divergences de vues sur le sens de la vie elle-même. Certains
considèrent que le médecin respecte la dignité du patient en fin de vie
lorsqu’il lui administre une injection létale ; d’autres pensent que le respect
de la dignité de la personne passe par la mise en œuvre de soins palliatifs.
Dans cette diversité d’approches, se jouent les choix éthiques déchirants entre
la responsabilité sociale du corps médical et la demande de la personne en fin
de vie. Des divergences profondes apparaissent dans la façon de considérer la
personne dans sa dignité et ses droits. Divergences d’autant plus
insurmontables que la question de la fin de vie touche l’émotion de chacun
devant la souffrance, – la sienne ou celle de l’autre -, face à l’épreuve de la
dégradation physique et le sentiment de ne pouvoir rien faire. Une émotion qui
vient parfois perturber le jugement éthique .Aujourd’hui, les fins de vie sont
de plus en plus médicalisées et solitaires et, selon les sondages, l’engagement
religieux ne semble pas fondamental pour dessiner la frontière entre les
partisans de l’assistance au suicide et ses opposants .
IV)
Conclusion
Les
représentations de la fin de vie traduisent de fortes craintes. Comme une peur
de la déchéance, ou encore celle de ne pas se sentir écouté par le corps
médical. De leur côté, les professionnels de santé sont tiraillés entre des
impératifs parfois contradictoires. Derrière des questions complexes, se
dévoilent en chacun des mouvements intérieurs où émotions et raison se
rencontrent. L’enjeu est de permettre l’expression de ces résonances pour
favoriser un travail d’élaboration.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire